MaPrimeRénov' pour les rénovations globales rouvre en version limitée, les collectivités dans le flou
Après trois mois de fermeture, le guichet MaPrimeRénov' pour les aides à la rénovation énergétique d'ampleur dans son logement a rouvert mardi dans des conditions plus retreintes.
Pour les collectivités qui distribuent ces aides, le flou et la déception continuent de régner.
Face à un important afflux de dossiers depuis fin 2024, l'Etat avait décrété une pause estivale du dispositif de subventions aux particuliers pour leurs projets de travaux cumulant plusieurs types de travaux d'amélioration de la performance énergétique dans leur logement.
Les ménages peuvent de nouveau déposer leurs dossiers mais les conditions d'octroi sont restreintes: seuls les logements classés E, F ou G au diagnostic de performance sont éligibles, les plafonds de travaux sont abaissés à 40.000 euros maximum (contre 70.000 euros avant) et les ménages aux revenus très modestes sont prioritaires.
La subvention maximale d'un ménage très modeste est divisée par deux, passant de 63.000 euros à 32.000 euros.
Le guichet rouvre mais sans budget puisque l'enveloppe de 3,6 milliards d'euros prévue pour 2025 devrait assurément être consommée par les dossiers déjà déposés avant juin.
Pour mieux gérer son enveloppe, l'Etat a ainsi fixé à 13.000 le nombre de nouveaux qui pourront être acceptés d'ici fin 2025 mais il ne seront financés qu'en 2026, sous réserve de vote du budget. Des "objectifs par territoire" et "un suivi hebdomadaire accessible aux acteurs de la rénovation" seraient aussi mis en place.
- "Fausse ouverture" -
"La note sur les modalités de suivi des objectifs est arrivée aujourd'hui", indique à l'AFP Suzanne Brolly, vice-présidente de l'Eurométropole de Strasbourg chargée de l'habitat, qui déplore un quota de 66 dossiers maximum pour son agglomération.
"C'est une fausse ouverture" selon elle, "il n'y a plus rien pour cette année", les conditions d'octroi sont "très limitées", avec une "enveloppe ridicule" et "seulement pour les ménages les plus fragiles". Se sentant "abandonnée", elle craint une augmentation de la "vacance énergétique", les logements laissés vides car hors des normes du logement digne.
En revanche en Loire-Atlantique, le président du conseil départemental Michel Ménard n'a "pas les éléments" sur ces objectifs ni "d'indications sur les moyens financiers que l'Etat va accorder en plus", et la réouverture reste donc "très floue".
"Au mois d'avril nous avions déjà assez de dossiers pour consommer l'enveloppe entière, il nous faudrait cinq millions d'euros de plus", explique-t-il à l'AFP, ajoutant que 525 dossiers étaient déjà en attente à fin juin.
Il calcule que les 13.000 dossiers au niveau national correspondraient à 260 dossiers pour la Loire-Atlantique, proportionnellement au nombre d'habitants.
La jauge de 13.000 est basse et "certains pensent que le guichet va fermer à la fin de la journée" après que tous les dossiers peaufinés depuis juin seront déposés, selon Sébastien Martin, président d'Intercommunalités de France. "Comme pour un concert des Rolling Stones, ça va partir en dix minutes", ironise-t-il.
- Abandon et détricotage -
Egalement député LR de Saône-et-Loire, il a déposé une proposition de loi pour confier la politique de rénovation énergétique des logements aux intercommunalités et aux départements volontaires pour participer à une expérimentation de deux ans.
Depuis le début de l'année, 71.828 dossiers de rénovations d’ampleur ont été acceptés, près du double par rapport à 2024, période perturbée par des changements de règles.
Ces nouveaux critères ont été critiqués par nombre d'élus et associations qui assurent que les subventions ne sont plus suffisantes pour les ménages à faibles revenus et qui craignent un coup d'arrêt de la dynamique de rénovation énergétique en France.
Le collectif Rénovons, d'entreprises et associations du secteur, dénonce dans une lettre adressée au Premier ministre un "abandon désormais limpide" de l'Etat de sa politique de rénovation énergétique qui a subi un "détricotage" au fil des années.
Le secteur du bâtiment est pour sa part las et agacé des modifications de règles incessantes depuis la création du dispositif. Dernière en date, l'exclusion à partir de 2026 de l'isolation des murs et l'installation de chaudières biomasse (bois et granulés) de la liste des travaux éligibles à "MaPrimeRénov' par geste", pour les travaux isolés.
A.Kaufmann--BVZ