

Léon XIV exclut toute réforme sur les femmes et les fidèles LGBT+
Place des femmes, accueil des fidèles LGBT+: le pape Léon XIV veut rassurer la frange des catholiques bousculée par la méthode de son prédécesseur François en écartant tout changement doctrinal à court terme, dans sa première interview depuis son élection.
Dans cet entretien publié dans un livre qui parait jeudi au Pérou, où il a vécu près de 20 ans et dont il détient la nationalité, le pape américain passe en revue les nombreux défis d'une Eglise catholique traversée par des courants divergents, quatre mois après avoir été élu à sa tête.
S'il ne semble pas dessiner de virage sur le fond, y compris sur la question brûlante de la pédocriminalité, ses propos peuvent être interprétés comme un message à une frange de l'Eglise attachée à la tradition, là où son prédécesseur François insistait sur la nécessité d'ouverture.
Concernant la possibilité d'ordonner des femmes diacres, sur laquelle une assemblée internationale avait débattu en 2023 et 2024, le pape de 70 ans confie ne "pas avoir l'intention de modifier l'enseignement de l'Eglise sur le sujet" à court terme.
Il précise toutefois vouloir "poursuivre sur la voie" de son prédécesseur argentin en "nommant des femmes à des postes de direction à différents niveaux de la vie de l'Eglise".
Répondant sur la question "très sensible" et "polarisante" de l'accueil des fidèles LGBT+ au sein de l'institution deux fois millénaire, Léon XIV dit s'aligner sur l'accueil de "tous, tous, tous", prôné par son prédécesseur mais réfute tout changement doctrinal, comme la reconnaissance du mariage homosexuel.
"Je pense que l'enseignement de l'Eglise restera tel quel", tranche-t-il dans cet entretien publié dans le livre intitulé "Léon XIV, citoyen du monde, missionnaire du XXIe siècle", qui paraît en espagnol.
"Tout le monde est invité, mais je n'invite pas une personne en raison de son identité particulière", souligne le pape, en expliquant ne pas vouloir "encourager la polarisation au sein de l'Eglise".
Fidèle à l'enseignement du catéchisme catholique, le pape renouvelle son soutien à "la famille traditionnelle" - "le père, la mère et les enfants" - dont "le rôle, qui a parfois souffert ces dernières décennies, doit être à nouveau reconnu et renforcé".
- "Fausses accusations" -
Décédé en avril à 88 ans, François avait concentré des attaques internes d'une virulence inédite de la part d'une frange conservatrice, notamment sur les restrictions du rite traditionaliste en latin ou ses critiques de la Curie romaine, le gouvernement central du Saint-Siège.
Sans modifier la doctrine, il avait multiplié les gestes d'ouverture envers les divorcés remariés et les fidèles LGBT+ et autorisé fin 2023 les bénédictions de couples de même sexe, une décision qui avait provoqué une levée de boucliers dans le camp conservateur, notamment en Afrique et aux Etats-Unis.
Début septembre, Léon XIV a reçu en audience privée le prêtre américain James Martin, l'un des principaux avocats des fidèles homosexuels dans l'Eglise catholique, mais n'a pas évoqué publiquement les quelque 1.400 catholiques LGBT+ venus récemment en pèlerinage dans le cadre du Jubilé, l'"Année Sainte" de l'Eglise.
Interrogé sur la lutte contre les violences sexuelles par des clercs, Léon XIV affirme que l'Eglise doit continuer d'accompagner les victimes avec "une compassion authentique et profonde".
Mais la question des violences sexuelles "ne peut pas devenir la priorité de l'Eglise", insiste le natif de Chicago lors de cet entretien de près de trois heures réalisé en anglais et en deux temps en juillet.
Devant les "cas avérés de fausses accusations" - il cite le chiffre de 10% d'accusations fausses -, il faut "protéger les prêtres, ou l'accusé, et respecter leurs droits", confie-t-il à l'autrice, la vaticaniste américaine Elise Ann Allen.
Plusieurs associations ont critiqué la protection de l'institution au détriment des victimes et reproché à François de ne pas être allé assez loin malgré ses nombreuses mesures, comme la levée du secret pontifical ou l'obligation de signalement.
Sur le plan économique, l'ancien missionnaire s'inquiète de l'écart croissant entre les niveaux de revenus et regrette de voir le milliardaire américain Elon Musk sur le point de devenir le premier au monde à posséder 1.000 milliards de dollars.
"Si c'est la seule chose qui a de la valeur désormais, nous sommes en grande difficulté", déplore-t-il.
O.Beyer--BVZ